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Pendant des siècles, la seule parade pour prévenir les caprices du lac intra-muros était le curage régulier des canaux. Dans le secteur parcouru par l'Isernon et ses affluents, c'est la mise en aqueducs couverts qui protégera définitivement des inondations les quartiers de Loverchy, de la Prairie et de la Croix-Rouge.
Les inondations
En dehors des crues mémorables de janvier 1651 (1,90 m au-dessus de la cote normale actuelle) et de février 1711 (2,30 m) les inondations dans le centre ville n'ont pas excédé de beaucoup plus d'un mètre le niveau règlementaire actuel qui est de 80 cm. La gravité des crues subies par nos ancêtres est imputable aux abus des riverains qui, avec leurs pilotis, ponts-volants et digues, entravaient le libre écoulement des eaux.
Les crues du réseau hydrographique de l'Isernon ne deviendront gênantes qu'avec l'urbanisation entamée dans les années 1920. En 1927, 1934 et 1940 les habitants des quartiers de Loverchy, de la Prairie et de la Croix-Rouge pataugent dans l'eau, mais ce n'est rien en comparaison des 1,50 m de la crue de [septembre] 1960.

illustration 1) Plan du réseau hydrographique d'Annecy (extrait centré sur le cours de l'Isernon).
La couverture de l'Isernon part du repère 12 (manufacture dite "la fabrique") jusqu'au Thiou, repère 15 (manufacture Machard).
« Histoires d'eaux - Maîtriser les ruisseaux », Marie-Claude Rayssac, Carnets d'archives, Ville d'Annecy éditions, ISBN 978-2-918873-08-2.
La corvée de curage
Avant la mise en place de la régulation du lac par un système de vannage en 1874, le seule remède employé contre les débordements était le curage des canaux. Pour procéder à cette corvée, Annecy réquisitionnait les hommes des communes riveraines du lac. Cette tâche particulièrement harassante et malsaine qui consistait à extraire un mélange de vase, d'ordures ménagères, de matières végétales, animales et fécales était mené à bien pendant la belle saison. Les matières étaient généralement enfouies dans des fosses creusées sur le Pâquier ou évacuées par les bateliers de Sévrier au plus profond du lac. Au XIXe siècle cette mission est confiée a des entrepreneurs qui doivent fournir cinquante manœuvres "bons, robustes et capables". Pour leur donner du cœur à l'ouvrage on leur procurait une ration d'eau de vie le matin et un demi-litre de vin l'après-midi.
L'effacement d'un réseau hydrographique
Les travaux de curage et de faucardement "à vieux sol et à vieux bord" de l'Isernon et de ses affluents - ruisseaux de Sainte-Catherine, de Loverchy et des Molasses - étaient assurés par les propriétaires riverains qui ne s'y résolvaient généralement que contraints et forcés par les autorités. Pour aménager la zone industrielle de Vovray l'assainissement et la mise hors d'atteinte des crues des terrains concernés est indispensable. Le syndicat intercommunal qui réunit Annecy et Seynod est autorisé, le 15 juin 1965, à mettre en aqueduc couvert l'Isernon, sur un peu plus de 2 km, et ses ruisseaux secondaires. Le réseau hydrographique de la Prairie a si bien disparu sous la voirie et les bâtiments que peu d'Annéciens soupçonnent son existence.

illustration 2) Travaux aux abords de l'Isernon, la rue de la Cité ne rejoignait pas l'avenue de Loverchy, et une passerelle reliait Annecy (à gauche) à Seynod (à droite), l'Isernon étant la séparation entre les deux communes. Au centre, le passage de la voie de chemin de fer Annecy <> Albertville
cliché © Archives municipales d'Annecy

illustration 3) Le même site, devenu un chemin pédestre que peu de personnes soupçonnent de dissimuler le cour de l'Isernon...
capture d'écran Google Street View - novembre 2022
Appendice 1
Le cours d'eau de l'Isernon traverse le territoire de Vovray et sert de limite communale avec [Seynod et] Cran-Gevrier.
Il prend sa source sur le territoire de Vieugy à 586 m., puis il longe le pied occidental du Semnoz et après avoir parcouru 6,6 km il atteint la rive gauche du Thiou à 450 m.
Suivant son niveau, il débordait abondamment pour former le ruisseau de la Prairie en inondant largement le vaste territoire situé en bordure de l'usine d'étain, jusqu'à la rue de la Cité. La société d'Électrochimie avait remédié à cette situation en procédant à la plantation d'une véritable forêt de peupliers.
Sur le long de son parcours annécien, l'Isernon a animé, jusqu'à une période récente, plusieurs installations hydrauliques, entres autres la blanchisserie du Moulin Rouge, la pisciculture de Vovray créée par les frères Chappaz (1920-1950), reprise par M. Machenaud et disparue vers 1970, l'huilerie Masson, la Manufacture d'ouates et cotons cardées créée en 1860 par Étienne Chamoux, fermée en 1960, et la scierie Boquet sur l'emplacement de laquelle est venue s'implanter la Société Graphocolor.

illustration 4) Travaux de la mise en tunnel de l'Isernon, novembre 1966
cliché Bernard Ruffet © Archives municipales d'Annecy
La création d'une zone industrielle intercommunale avec Seynod en 1966 allait entraîner la couverture de l'Isernon dès Vovray, au pied du chemin de l'Huilerie jusqu'au Thiou, de telle manière qu'aujourd'hui on éprouve quelques peines à retrouver son parcours après son franchissement de l'avenue de Loverchy (emplacement d'un pont qui marquait l'entrée d'Annecy) et son défilement derrière le cimetière jusqu'au Thiou.
Sources :
- Bulletin municipal Annecy N°224, novembre-décembre 2012,
- « Les rues d'Annecy, tome II » de Georges Grandchamp, Annesci 43, Société des Amis du Vieil Annecy.
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